234-Vahanavank (Arménie début)

Nous quittons l’Iran à la douane de Norduz le samedi 20 mai, soit 29 jours après notre entrée le 22 avril. Le visa n’est en fait pas de 1 mois mais de 30 jours et nous avons préféré garder 1 jour disponible en cas d’incident toujours possible. Arrivé à 11h., les formalités de sortie sont assez rapides, l’essentiel étant de bien faire tamponner notre carnet de passage en douane. Sans ce justificatif de sortie du véhicule du territoire iranien, il nous serait très difficile de récupérer la caution que nous avons laissée à l’Automobile Club de France.
A 12h., la barrière iranienne franchie, c’est la douche froide.  L’amabilité iranienne cède la place à la suspicion arménienne. Des hommes armés, à la mine patibulaire, en treillis militaire, vont s’occuper des formalités. Regards sévères, airs peu engageants, rigueur dans le travail. Le portrait du président russe Poutine est apposé au mur, mais point de portrait du président arménien Sargsian, ou alors, si discret que je ne l’ai pas vu. Assurance obligatoire bien que nous soyons déjà assuré par Allianz. Tout ceci prendra deux heures. Nous sommes libérés de nos obligations à 14h. iranienne, soit 13h30 arménienne dû à la demi heure de décalage horaire entre les deux pays.
Nous nous arrêtons à Garat, première ville, ou plutôt gros village, sur notre route. Et là dans ce petit restaurant où nous sommes les seuls clients, c’est Byzance! De la purée de pommes de terre, de la viande de porc, de la salade verte, et du vin. Plus d’un mois que nous n’avions pas eu accès à ces « frivolités ».
La touristique route M17 que nous voulions prendre est fermée pour on ne sait quelle raison, aussi nous empruntons la principale et très rapiécée route M2 qui franchit le col Meghri à 2535m. Une descente assez raide et nous voilà à la petite ville de Karajan où la première épicerie venue dévoile ses alignements de bouteilles d’alcool, dont principalement la vodka.

La surprise de cette première journée et confirmée par la suite, est le nombre incroyable de grosses mercedes, 8 à 9 sur 10 véhicules, déboulants sur les routes, alors que le salaire mensuel moyen est de 250€.

Changement de climat également. Les paysages secs de l'Iran ont cédé la place à des terres bien vertes et à des ciels changeants.
Nous poursuivons jusqu’au monastère Vahanavank qui sera notre étape du jour à 1100m. d’altitude.
Nous serons rejoins là le lendemain matin par deux hommes et une femme venus procéder à un sacrifice rituel, autour de l’arbre derrière le monastère. Je ne l’ai pas vu mais Claude m’a raconté qu’ils avaient amené avec eux un coq vivant. Ils ont marmonné quelques « prières », lui ont coupé la tête, puis fait 7 fois le tour de l’arbre en projetant son sang sur le tronc. Ensuite, ils sont repartis calmement, d’un pas décidé, et en silence, après avoir fait une prière dans le monastère. Nous saurons plus tard qu'il s'agit d'un rite encore largement pratiqué en Arménie, le madagh.

Après les mosquées en Iran, Vahanavank sera le premier d'une longue série de monastères en Arménie.

235-Tatev

Le lendemain, après avoir vainement cherché la forteresse Halidzor en empruntant un étroit chemin forestier, nous prenons à gauche à l’entrée de Kapan, direction Tatev et son monastère. Cette route est une succession de rues pavées à forte inclinaison jusqu’à Arajadzor. De là nous essayons de rejoindre la route dite principale sur la carte Reise-know-how édition 2015. Au détour d’un chemin, bordé de magnifiques champs de marguerites, nous perdons de vue Claude et Nicole . Nous les retrouverons à Tatev. Cette route principale est en fait un chemin forestier en terre avec de très nombreux trous et bosses  qui nous oblige à rouler à vitesse réduite sur ces derniers 30 km, d’autant plus que nous avons droit à une belle averse. Mais nous sommes récompensés par la vue du monastère de Tatev, perché à 1550m. au bord d’une falaise, dominant le canyon des rivières Vorotan et Tatev. Un site grandiose qu’un rayon de soleil bienvenu nous permettra d’admirer. Des murailles protègent le bâtiment principal du monastère, son église Saint Pierre et Saint Paul dont les fondations dateraient de l’an 895. Au XIème siècle, plus de 300 moines vivaient ici, faisant rayonner cet important centre spirituel. Invasions et séismes, dont le dernier en 1936, eurent raison de cet ensemble reconstruit à l’identique au milieu du XXème siècle. Nous n’avons pu visualiser la petite église de la Sainte Mère de Dieu, recouverte d’un blanc linceul devant lui permettre sa renaissance.
Tatev est l’une des destinations privilégiées des arméniens malgré son accès difficile par une route vertigineuse qui serpente sur les flancs du canyon. Pour éviter cette route, la plupart des visiteurs emprunte depuis 2010, le plus long téléphérique du monde qui, avec ses 5,7 km d’un seul tenant et ses 320m de hauteur, relie Halidzor à Tatev, les deux sommets des flancs du canyon. Toute l’année, ses cabines de 25 personnes permettent d’éviter plus d’une heure de route. Les cyclistes que nous avons rencontré à Tatev avaient utilisé, sans vergogne et pour leur plus grand plaisir, ce moyen de transport.
Nous repartirons par cette route en direction d’un autre monastère, celui de Vorotnavank.

236-Sisian

Nous traversons de beaux paysages de verdure sur fond de montagnes enneigées. Posé sur un replat, le monastère Vorotnavank domine la rivière Vorotan. Construit au Xème siècle, il est entouré de murailles car il avait aussi une fonction de forteresse. Fonction qui lui a permis au XIIIème siècle de résister aux envahisseurs mongols. En 1723, le site fut un haut lieu de lutte pour la libération nationale de cette région alors sous dépendance perse.

Après une pause déjeuner près d’un petit lac, la route nous fera découvrir 4km plus loin en direction de Sisian, au détour d’une rue du village d’Aghitu, un curieux monument d’origine inconnue, vraisemblablement à but commémoratif. Quelques pierres tombales sculptées sont disposées autour de la tour.
Encore 5km et nous voilà dans la petite ville de Sisian, à l’ambiance austère, typique des anciennes régions sous domination soviétique. Ceci ne nous empêche pas d’y faire nos courses dans des boutiques assez bien achalandées. Mais la particularité de Sisian est le champ de menhirs de Zorats Kar, à 2km au nord de la ville. A 1600m d’altitude, un alignement de pierres dressées. Aménagé il y aurait 7500 ans, ce site serait bien antérieur à Carnac ou Stonehenge.

237-Noratus

Les 80 km suivants de la grande route nationale M2 menant de la frontière iranienne à la capitale Erevan sont en très mauvais état. Un vieux goudron avec de nombreux trous et bosses jusqu’à Yeghegnadzor. Là, nous mettons cap au nord en direction du lac Sevan. Nous trouvons un joli bivouac du coté de Yeghegis, petit village reculé au pied de la forteresse Smbataberd que nous n’avons pas trouvé. En reprenant la route le lendemain, nous franchissons la Sulama Pass à 2410m où se trouve le caravansérail de Selim. Ce monument daté de 1322 et à cette altitude, indique que cette route était un axe important entre le sud persan et le nord caucasien. La longue salle était réservée aux humains, les animaux restant à l’extérieur. Seules trois lucarnes percent le plafond afin de garder un peu de chaleur. Un taureau et une chimère gravés au dessus de la porte d’entrée gardent le caravansérail. Nous ne nous attardons pas, la température ayant tôt fait de réduire nos ardeurs touristiques.
Suit une longue et jolie descente vers le lac Sevan que nous rejoignons à Martuni.

Le lac Sevan est l’une des fiertés des arméniens. A 1920m d’altitude, il a une forme de poire d’environ 75km de long et 56km dans sa plus grande largeur. Il s’écoule dans la rivière Hrazdan qui elle-même se jette dans la rivière Araxe qui sépare l’Arménie de l’Iran. Les besoins de l’irrigation des terres, déterminés par des ingénieurs russes sous la houlette de Staline, ont failli le faire courir à sa perte. A partir de 1950, le niveau du lac a commencé à baisser avec comme prévision une baisse de son niveau de 50 mètres sur 50 ans. En 1978, le gouvernement a pris conscience du problème en déclarant le lac et ses rives parc naturel protégé. Heureusement car le niveau avait alors baissé de 19 mètres. Mais des problèmes énergétiques ont conduit à de nouveaux pompages pour faire fonctionner des usines hydroélectriques. Une usine nucléaire en remplacement a permis de stopper l’hémorragie. Le niveau commence alors à remonter créant d’autres problèmes car des constructions ont profité de la baisse du niveau pour prendre place sur les rives.
Lors de notre passage, la météo n’était pas au mieux de sa forme et nous n’avons pu profiter des plaisirs aquatiques. Mais ce fut l’occasion de nous rendre à Noratus, au cimetière des Khatchkars. Ce sont des stèles sculptées datant du IXème au XVème siècle, certaines représentant les personnes enterrées ou leur mode de vie. La pluie avait bien mis en évidence les lichens rougeâtres recouvrant les monuments. Malgré le froid dû à cette météo maussade, des dames se sont faites un plaisir de commenter, aux touristes que nous sommes, la visite des lieux, moyennant l’achat d’une de leurs productions tricotées, châles, coussins, écharpes, petits personnages, etc….. Ce champ de Khatchkars autour d’une petite chapelle est le plus grand d’Arménie.

238-Gavar

Anecdote: Garé au cimetière, je constate que le pneu arrière droit de mon véhicule s’est de nouveau légèrement dégonflé. Aussi nous nous décidons à chercher un garage de réparations de pneumatiques. Nous le trouverons non loin, à Gavar. Le garagiste a tôt fait d’enlever le clou et de réparer. Il s’aperçoit alors que nos pneus sont montés à l’envers, c’est à dire les flancs extérieurs à l’intérieur et inversement. Et dire que depuis le Chili où nous les avions fait monter, nous ne nous en étions pas aperçus!

Pendant l’opération, du café nous est offert dans la boutique de pièces détachées attenante. Le patron y fait des bisous à son canari adoré. Quelle sympathique équipe dans ce garage!

L’ambiance de Gavar était plutôt froide, tendance soviétique, mais l’accueil des personnes rencontrées nous a fait porter un regard nouveau sur les arméniens.

239-Hayravank

Monastère Hayravank
Monastère Hayravank

Le long du lac Sevan, les deux monastères Hayravank et Sevanavank sont parmi les plus visités d’Arménie. Faciles d’accès, à moins de 70km d’Erevan, leurs positions en surplomb du lac en font des paysages de cartes postales. Nous avons eu la chance pour le premier de le voir éclairé par un magnifique soleil couchant qui avait réussi à percer les nuages noirs de l’orage finissant. Par contre, le second était fermé à cause de la pluie battante.
Les deux monastères ont été bâtis entre le IXème et le XIIème siècle. Il n’en reste que les églises, et, pour Hayravank, des Khatchkars arborant une couleur orangée, due comme au cimetière de Noratus, aux lichens qui s’y sont déposés. L’intérieur de l’église Hayravank , de même que les autres églises, est très sombre, les murs noircis par la suie des bougies. Les deux bâtiments sont faits de pierres volcaniques provenant de la chaine du Ghegam, culminant à 3600m, qui sépare le lac Sevan à l’est, de Erevan à l’ouest.

240-Erevan

Erevan: la cascade
Erevan: la cascade

Erevan nous accueille à 1000m d’altitude, au pied du mont Ararat, sous un beau ciel bleu. Notre premier souci sera de trouver un lieu de bivouac au centre de la ville, comme d’habitude, dans le but d’être près des monuments afin de ne pas laisser Farouche enfermé trop longtemps dans le véhicule, surtout s’il fait chaud. Le parking de la nouvelle cathédrale Saint Grégoire l’illuminateur (Sourp Grigor Loussavoritch) fera très bien notre affaire. Elle a été édifiée en 2001 à l’occasion du 1700ème anniversaire de l’adoption en l’an 301, du christianisme, religion officielle de 95% des la population. L’Arménie est le premier pays à avoir adopté cette religion, le christianisme n’ayant été adopté comme religion officielle dans l’Empire romain qu’à la fin du IVème siècle. L’église arménienne ne reconnait que l’autorité du catholicos KarekineII qui siège à Etchmiadzine. C’est lui qui a consacré cette cathédrale où sont déposées les reliques de Saint Grégoire offertes par le pape Jean-Paul II, reliques auparavant conservées dans une église de Naples.
Erevan, capitale du pays depuis 1918, est passée de moins de 50000 habitants alors à une agglomération de plus de 1,2 millions personnes aujourd’hui.
Ce développement fulgurant et anarchique laisse un héritage soviétique de quartiers et d’habitations dégradés. Depuis l’indépendance en 1991, une politique de grands travaux est entreprise, et en 2007 fut inauguré l’Avenue du nord reliant la ‘Place de la République’ à la ‘Place de l’opéra’. De part et d’autres de cette avenue, la ville présente un visage plus moderne, avec en point d’orgue la ‘Cascade’ qui dévale du ‘Parc de la victoire’ jusqu’à la place où se situe l’opéra, rebaptisée ‘Place de la liberté’. Il s’agit d’une succession de grandes marches débouchant sur cette place où sont exposées de superbes oeuvres d’artistes de renom, comme une plantureuse statue du colombien Botero. Cette place est le centre culturel et ‘bobo’ de la ville, mais peut devenir parfois le théâtre de manifestations politiques.
Place de la République, nous sommes intrigués par une imposante limousine blanche décapotée. Elle attend les touristes que nous sommes et va nous permettre de faire un tour de ville de 3h en grand confort. Nous ferons en particulier deux arrêts sur les hauteurs de Erevan.
Le premier arrêt sera pour le mémorial de Tsitsernakaberd, lieu de mémoire dédié aux victimes du génocide arménien. Il domine la ville de sa flèche élancée de 44m de haut protégeant une flamme éternelle. Des personnalités du monde entier, comme les français Jacques Chirac, François Hollande ou Jean Claude Gaudin, sont venues planter des arbres en signe de solidarité avec les victimes. Un monument indiquant la reconnaissance officielle par la France du génocide arménien en 2001, sous la présidence de Jacques Chirac, y est également érigé. Au moment de notre passage, des jeunes gens entonnaient ‘a capella’ un hymne à la mémoire des disparus.
Le second arrêt nous permet de voir le glaive brandi de la statue de la Mère Arménie dressée au sommet d’un imposant monument du ’Parc Haghtanak’. Lors de notre passage, un important groupe de touristes iraniens était présent. Ceux ci viennent à Erevan goûter aux joies de la liberté dans cette capitale qui n’est qu’à une quinzaine d’heures de bus de leur patrie.

Un musée dédié aux hommes illustres du pays fait la part belle à Charles Aznavour, né à Paris de parents arméniens, et devenu également citoyen arménien en 2008.

Le soir venu, nous avons pu bavarder en espagnol avec un jeune arménien qui avait fait une année d’étude à Bilbao en Espagne. Nous apprenons avec étonnement que l’Arménie participe au programme européen Erasmus d’échanges d’étudiants et d’enseignants.
Erevan a un fort parfum d’occident en son centre et les étrangers que nous sommes s’y sentent tout à fait à l’aise.

241-Khor Virap

A 50km au sud de Erevan et moins de 2km de la frontière turque matérialisée par la rivière Araxe, le monastère de Khor Virap dresse sa silhouette sur un petit tertre, sur fond de Mont Ararat. La photo emblématique de l’Arménie de ce décor apparaît dans maints ouvrages.

Nous avons attendu en vain le moment privilégié où le mont enneigé serait complètement dégagé des nuages qui le couvrent. Mais ne boudons pas notre plaisir; l’Ararat a bien voulu nous saluer en soulevant fugitivement le chapeau de nuages qui couvrait son chef. Pas suffisamment cependant pour apercevoir l’arche de Noé qui s’y est posée après le Déluge. Autrefois arménien, le mont Ararat est le plus haut sommet de Turquie avec ses 5165m.
Deux églises datées de 1661 ont été construites à l’intérieur des remparts, celle de la Sainte Vierge et, plus petite, celle de Saint Grégoire. Celui-ci a été enfermé en ce lieu pendant 13 ans au fond d’une profonde fosse, éclairée seulement par une petite ouverture. On peut y accéder, si l’on n’a pas trop d’embonpoint, par une échelle située dans l’église. Khor Virap, qui signifie fosse profonde, est un des plus importants lieux de pèlerinage d’Arménie.
Un autre monastère nous attend, celui de Geghard, à une trentaine de kilomètres de Erevan. Auparavant, nous visitons encore une église où avait lieu un baptême, et proche de Geghard, le temple de Garni, qui, depuis l’an 77,  a réussi à conserver ses colonnes hellènes dressées sur un piedestal.
Un pique-nique face à l’Ararat enfin découvert plus largement, il y a pire comme décor!

242-Geghard

A 1600m d’altitude, au fond d’une gorge boisée où coule un torrent, apparait le monastère de Geghard. Classé au Patrimoine mondial de l’Unesco, il est un haut lieu de spiritualité où les arméniens viennent tout à la fois, prier, accomplir le rituel maghan ( sacrifice d’un coq) ou attacher des rubans votifs aux branches des arbustes présents à l’arrière du monastère. Ses fondations remontent au Moyen Age, mais c’est la famille Prochian au XIIIème siècle qui l’a acquis et développé. Un bas relief représentant une tête de boeuf tenant deux lions en laisse et surmontant un aigle tenant un agneau, sont les armoiries de cette famille princière. C’est sans doute elle qui fit creuser deux chapelles troglodytiques qui font la renommée du site. Leurs salles  sont contigües et l’on passe des unes aux autres moyennant quelques marches.

Des croix sont sculptées dans la roche. La croix arménienne est une croix latine dont les extrémités des branches sont deux trèfles. L’une des croix présente est une intéressante croix arménienne modifiée où les trèfles sont remplacées par des croix, avec Adam et Eve au pied de la croix.
La caractéristique principale de l’une des salles souterraines est son excellente acoustique. Des chanteurs sont souvent convoqués aux passages des groupes de touristes afin de leur faire écouter ‘a capella’ des chants religieux. Nous avons pu profiter par hasard d’une de leurs prestations dont vous pouvez profiter en cliquant sur la photo ci-dessus. Notre ami Claude s’y était essayé avant leur arrivée mais il fut rapidement interrompu par un gardien, malgré des vocalises qui n’étaient pas si mauvaises. Nous avons eu beau indiquer qu’il s’agissait de chants religieux en français, mais rien n’y fit. Nous sommes allés le consoler en dégustant un repas de truites grillées dans un sympathique restaurant avec jolie vue sur la gorge.


243-Etchmiadzin

De Geghard, à 30km à l’est de Erevan, nous filons sur Etchmiadzin à 20km à l’ouest de la capitale. Les distances ne sont pas très grandes en Arménie avec ses 29800 km2, soit à peu près la superficie de la Belgique (30500 km2).
A peu de distance, le temple de Garni mérite un arrêt car on ne peut qu’être étonné de trouver là les ruines assez bien conservées d’un temple grec. Dédié au dieu du soleil, il fut érigé en l’an 77 par le roi arménien Tiridate Ier, du temps où Parthes dominait encore cette partie de l’Asie.
Etchmiadzin est un lieu incontournable en Arménie. Cette ville est le siège du patriarche suprême de l’Eglise arménienne, le Catolicos Karékine II. La cathédrale est le plus ancien édifice chrétien d’Arménie. Souvent modifié, notamment au XVIIème siècle, le  monument était couvert d’échafaudage lors de notre passage Mais les fresque de l’intérieur sont un festival de couleurs chatoyantes. Nous sommes très loin de l’austérité des mosquées iraniennes. La cathédrale est située dans une enceinte à l’intérieur de laquelle se trouve également le palais du Catholicos. Une grande arche permet l’accès à cette enceinte. A l’extérieur un curieux bâtiment cylindrique surmonté d’une vaste coupole attise notre curiosité. Il s’agit du séminaire-université construit au siècle dernier. Nous avons assisté brièvement à une cérémonie officiée par des religieux vêtus d’habits un peu fantômatiques donnant à ce lieu une atmosphère très particulière.

244-Sardarabad

Chaque année du 24 au 28 mai, a lieu à Sardarabad, à 25 km à l’est de Etchmiadzin, une fête dédiée aux glorieuses heures de l’histoire arménienne. Nous décidons de nous y rendre, mais, déception, cette année, des personnes présentes nous ont indiqué que la fête se résumerait à la visite de personnalités officielles, du moins c’est ce que nous avons compris. Sardarabad est le lieu où les arméniens ont repoussé le 28 mai 1918 des turcs pourtant bien supérieurs en nombre, en route pour la prise de Erevan. Le génocide des arméniens en Turquie avait eu lieu en 1915-1916. Cette victoire stoppant l’avancée des turcs aura pour cons séquence la proclamation par l’Arménie de son indépendance, 4 jours plus tard. Mais en 1920, les soviéts prennent le contrôle de l’ensemble du Caucase, dont l’Arménie. En 1991, après la dissolution de l’empire soviétique, l’Arménie se proclame indépendante le 21 septembre.
Le Mémorial élevé en 1968 est d’inspiration soviétique, avec ses taureaux ailés et son allée des aigles menant au ‘mur de la victoire’.

Nous en serons quitte pour visiter le musée ethnographique de Sardarabad où nous pouvons bivouaquer à condition de partir le lendemain avant 9 heures à cause de la cérémonie.

245-Saghmosavank

Saghmosavank
Saghmosavank

La route M3 mène plein nord en direction de la Georgie, mais avant de l’emprunter nous ne résistons pas la curiosité de visiter deux monastères à proximité.
Le premier sera  Hovhannavank (monastère Saint Jean). Comme souvent, il est implanté au bord d’une falaise. Ce sera également le cas de Saghmosavank (monastère des psaumes). Dans tous les pays les religieux ont toujours trouvé des emplacements de choix et ce dernier est particulièrement bien choisi avec le mont Ararat en toile de fond. Si le soir nous avons eu droit à une belle averse de grêle, le lendemain, un grand ciel bleu nous fera apprécier davantage ce lieu magnifique. Les murs de ces églises sont souvent nus, seulement agrémentés de un ou deux tableaux richement colorés que quelques bougies viennent éclairer. Les deux églises datent du XIIIème siècle et sont encore largement utilisés pour des offices religieux.

246-Alphabet

Non loin de Saghmosavank est érigé le Mémorial de l’alphabet arménien. Créé en 405 par Saint Mesrop, il comptait au départ 36 lettres auxquelles ont été ajoutées deux lettres au XIIIème siècle. L’arménien occupe une place à part dans les langues indo-européennes. Il est parlé autant à l’intérieur du pays que par la diaspora à l’étranger. Les graphismes de cet alphabet nous parait très esthétique mais aussi difficile à déchiffrer, car un mot est une succession de jambages dont on perçoit peu les césures.
En ce 28 mai, jour de fête nationale, des élèves venus en cars fonctionnant au gaz, se font un plaisir de circuler et monter sur tous ces jambages de pierres.

247-Pain tradition

Dans la petite ville de Aparan, il est l’heure du défilé. Les jeunes femmes en tenue locale se préparent à déambuler, tout comme les militaires, les personnalités et les civils. Sans oublier les symboles religieux afin de ne pas oublier les racines chrétiennes du pays.
Après le retour du cortège, nous nous rendons dans un petit immeuble moderne du centre ville afin d’y acheter du pain. A l’intérieur, une très grande boulangerie et de nombreux clients. L’attraction du lieu est la cuisson traditionnelle des galettes. En entrant, nous avons vu un homme se jetant dans une grosse sphère de terre colorée au risque de basculer à l’intérieur. Le boulanger dépose ses galettes une à une en les jetant sur les parois. Un court moment de cuisson et une autre personne les retire avec un long manche en bois. Une étonnante façon de procéder que n’avions pas encore eu l’occasion de visualiser bien qu’en ayant entendu parler. Le boulanger assure le spectacle et contribue ainsi à la notoriété de l’établissement.

 


248-Sanahin

Sanahinvank
Sanahinvank

Nous quittons Aparan, direction deux monastères classés au Patrimoine mondial de l’Unesco, Sanahin et Haghpat. Tous deux sont proches de Alaverdi, petite ville à 30km de la frontière géorgienne, le long de la grande route M6.
Pas de chance; à Vanadzor, la route est ouverte mais en travaux. Elle est complètement défoncée et après 3 km nous nous arrêtons à un restaurant pour obtenir des informations. Le sympathique patron nous conseille de faire demi-tour et prendre la M3 jusqu’à Gyulagarak. Là, prendre à droite et rejoindre la M6 à Dzoraget. A Kurtan, à mi chemin de ces deux villes, nous nous fions à notre carte routière Arménie au 1/250 000 de 2016, et au lieu de poursuivre tout droit, nous bifurquons à droite. Nous aurions mieux fait d’obtenir confirmation de l’information par un habitant des lieux, car la route que nous empruntons est désaffectée depuis plusieurs années et dans un état lamentable. Rien n’est pire pour nos cellules que du vieux goudron défoncé dont il ne reste que quelques bribes. Après deux heures de chemin forestier, nous nous retrouvons sous la pluie et dans la boue dans une ferme. Nous bivouaquons et retrouvons la bonne route le lendemain à Kachaghan. Nous avons pu apercevoir au passage le monastère Hoevank en contrebas du chemin, sur une croupe herbeuse dépassant des arbres. Plus loin, Alaverdi apparait au fond de la vallée, d’où nous remontons vers le monastère Sanahin.
Construit au Xème siècle puis agrandi au XIIIème siècle, Sanahin comporte plusieurs édifices. Mais, à notre avis, il faut beaucoup d’imagination pour se représenter la vie spirituelle qui régnait alors dans ce site austère. On notera en haut de la façade de l’église Saint Sauveur, les princes Smbat et Gurguen, fils de la fondatrice, la reine Khosrovanouch, sculptés dans la pierre et tenants la maquette de l’église.
Sanahin et Alaverdi sont aussi connus par deux de leurs enfants, les frères Migoyan, à qui l’on doit les fameux avions soviétiques Mig.

249-Haghpat (Fin Arménie)

Haghpat
Haghpat

Il faut redescendre à Alaverdi pour, à quelques kilomètres, monter vers Haghpat, car ce dernier monastère est installé à 1000m d’altitude sur un plateau dominant le canyon de la rivière Débet. Construits à la même époque que Sanahin, plusieurs bâtiments composent l’ensemble du site. Le clocher daté de 1245 se dresse fièrement à quelques mètres des 2 églises Saint-Grégoire et Saint-Signe et de la chapelle Sainte-Mère-de-Dieu qui composent le monastère. Des fragments de fresques sont visibles sur les murs de l’église Saint-Signe.
A une dizaine de kilomètres plus au nord, à mi-chemin de Alaverdi et de la frontière géorgienne, Aktala est le dernier monastère arménien. Situé à 700 m d’altitude sur un promontoire dominant la ville de Aktala, il est protégé par une enceinte. Le site est malheureusement gâché par les mines de cuivre en activité qui le bordent.
Le monastère n’est pas classé au Patrimoine mondial de l’Unesco, mais il vaut largement le détour car son église Sainte-Mère-de-Dieu possède des fresques murales parmi les plus belles que nous ayons vu en Arménie.
Demain nous quittons l’Arménie, pauvre mais attachante, pour la Géorgie.